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Guillaume Tell” by Gioachino Rossini libretto (French)

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Contents: Personnages; Premier Acte; Deuxième Acte; Troisième Acte; Quatrième Acte
PREMIER ACTE

La scène se passe à Bûrglen, canton d'Uri ; à
droite se trouve la maison de Guillaume Tell ;
à gauche débouche le torrent de Schàchental,
sur lequel un pont est jeté ; une barque est
attachée au rivage. Des paysans entourent de
verdure des cabanes destinées à trois
nouveaux couples ; d'autres se livrent à divers
travaux agrestes. Jemmy s'essaie à tirer à
l'arc ; Tell pensif et appuyé sur sa bêche, est
arrêté au milieu d'un sillon. Hedwige, assise
près d'un chalet, assemble les joncs d'une
corbeille et regarde alternativement son
époux et son fils.


CHŒUR
Quel jour serein le ciel présage !
Célébrons-le dans nos concerts ;
Que les échos de ce rivage
Élèvent nos chants dans les airs !
Que les échos,etc.
Par nos travaux, rendons hommage
Au créateur de l'univers.
Quel jour serein, etc.

PÊCHEUR
Accours dans ma nacelle,
Timide jouvencelle ;
Du plaisir qui t'appelle
C'est ici le séjour.
Je quitte le rivage ;
Lisbeth, sois du voyage ;
Ah ! viens, le ciel sans nuage
Nous promet un beau jour, etc.

TELL (à part)
Il chante en son ivresse,
Ses plaisirs, sa maîtresse ;
De l'ennui qui m'oppresse,
Il n'est pas tourmenté.
Quel fardeau que la vie !
Pour nous plus de patrie !
Il chante, et l'Helvétie
Pleure, pleure sa liberté.

PÊCHEUR
Des fleurs ceignent sa tête ;
Leur puissance secrète,
Conjurant la tempête,
Nous répond du retour, etc.
Et toi, lac solitaire,
Témoin d'un doux mystère,
Ne dis pas à la terre
Le secret de l'amour ! etc.

JEMMY, HEDWIGE
Son imprudent courage
Appelle le naufrage
Et défiant l'orage,
Ne pense qu'au retour, etc.
Vers l'écueil qu'on redoute,
S'il suivait sa route,
Un chant de mort, sans doute,
Suivrait les chants d'amour ! etc.

TELL (à part)
Quel fardeau que la vie !
Pour nous plus de patrie !
Il chante et l'Helvétie
Pleure son dernier jour !
Il chante et l'Helvétie, etc.
(On entend les ranz des vaches.)

CHŒUR
On entend des montagnes
Le signal du repos ;
La fête des campagnes
Abrège nos travaux, etc.
Cette fête champêtre,
Qu'ignore l'œil du maître,
Nous fera reconnaître
Le doux pays natal.
(Le vieux berger Melchthal descend lentement
le chemin de la montagne, appuyé sur le bras
de son fils Arnold et suivi de quelques
Suisses. Tout le village l'accueille avec
enthousiasme et se presse joyeusement
autour de lui.)


JEMMY, HEDWIGE, PÊCHEUR, TELL, CHŒUR
Salut, honneur, hommage au vertueux
Melchthal ! etc.

HEDWIGE
La fête des pasteurs, selon l'antique usage,
De trois jeunes amants fait trois heureux époux.

ARNOLD (à part)
Des amants, des époux !...Ah ! quel penser m'assiège !
(Hedwige s'avance vers Melchthal, pour lui
demander de bénir l'union des jeunes couples.)


HEDWIGE
Bénis par vous.

MELCHTHAL (cédant)
Par moi ?

HEDWIGE
Vous nous bénirez tous.

TELL
De l'âge et des vertus c'est le saint privilège,
Et des bienfaits du ciel un présage bien doux.

MELCHTHAL
Pasteurs, que vos accents s'unissent,
Qu'au loin vos trompes retentissent !
Célébrez tous en ce beau jour
Le travail, l'hymen et l'amour...

CHŒUR (Femmes)
Aux chants joyeux qui retentissent,
Que nos accents plus doux s'unissent !
Célébrons aussi tour à tour
Le travail, l'hymen et l'amour !

ARNOLD, PÊCHEUR, TELL, MELCHTHAL, JEMMY, HEDWIGE, CHŒUR
Célébrons tous en ce beau jour,
Le travail, l'hymen et l'amour ! etc.

CHŒUR
Près des torrents qui grondent,
Que les cors se répondent !

Et l'écho de ces monts,
Retenant nos chansons
En dira les doux sons
Aux forêts, aux vallons !
Oui, l'écho de ces monts, etc.
...Aux bois, aux vallons !
Célébrons par nos jeux
Et l'hymen et ses nœuds, etc.
Près des torrents qui grondent,
Que les cors se répondent, etc.
Célébrons, célébrons par nos jeux
Et l'hymen et ses nœuds, etc.
Près des torrents qui grondent,
Que les cors se répondent,
Par nos chants, par nos jeux
Des pasteurs amoureux
Célébrons les doux nœuds, etc.
Et volons auprès d'eux !
Par nos chants, etc.
...Et volons auprès d'eux !
(La foule se disperse.)

TELL (à Melchthal)
Contre les feux du jour que mon toit solitaire
Vous offre un abri tutélaire !
C'est là que dans la paix ont vécu mes aïeux,
Que je fuis les tyrans, que je cache à leurs yeux
Le bonheur d'être époux, le bonheur d'être père.
(embrassant son fils)

MELCHTHAL (à Arnold)
Le bonheur d'être père !
Tu l'entends, ô mon fils, c'est le suprême bien.
Veux-tu tromper toujours le vœu de ma vieillesse ?
La fête des pasteurs par un triple lien
Va consacrer, dans ce jour d'allégresse,
Le serment de l'hymen, et ce n'est pas le tien ?
(Tous s'éloignent, sauf Arnold.)

ARNOLD
Le mien, dit-il, jamais le mien !
Que ne puis-je taire à moi-même

De quel fatal objet tous mes sens sont épris!
Toi, dont le front aspire au diadème,
Ô Mathilde, je t'aime !
Je t'aime, et je trahis
Le devoir et l'honneur, mon père et mon pays !
Contre l'avalanche homicide
Ma force te servit d'égide :
Je te sauvai, toi, la fille des rois,
Toi qu'une puissance perfide
Destine à nous donner des lois !
Ivre d'un fol espoir, ma jeunesse insensée
A prodigué son sang pour des maîtres ingrats :
Avoir connu sous eux la gloire des combats,
Voilà ma honte ! aussi, mes pleurs l'ont effacée :
Par un funeste amour ne la rappelons pas.
(sons d'une chasse au loin)
Mais quel bruit ? Mais quel bruit ?
Des tyrans qu'a vomis l'Allemagne
Le cor sonne sur la montagne.
Gessler est là ; Mathilde l'accompagne ;
Il faut la voir encore, entendre encore sa voix ;
Soyons heureux et coupable à la fois !
(Arnold va pour s'éloigner quand il se trouve
en face de Guillaume Tell qui sort de sa maison.)


TELL
Où vas-tu ?
Quel transport t'agite ?
L'approche d'un ami n'arrête point ta fuite ?

ARNOLD
Non, non, non !

TELL
Pourquoi trembles-tu ?

ARNOLD (à part)
De feindre aurai-je le courage ?
(haut)
Sous le fardeau de l'esclavage
Quel grand cœur, quel grand cœur n'est pas abattu ?

TELL (à part)
Je comprendrais des maux que je partage :
Arnold ne m'a pas répondu,
Arnold ne m'a pas répondu !

ARNOLD (à part)
Suis-je assez malheureux ?

TELL (à part)
Malheureux ?
Il me cache un mystère.
(haut)
Pourquoi te taire ?

ARNOLD
Qu'espères-tu ? Qu'espères-tu ?

TELL
Rendre à ton cœur, rendre à ton cœur la
force et la vertu... Arnold !

ARNOLD (à part)
Ah ! Mathilde, idole de mon âme !
Il faut donc vaincre ma flamme ?

TELL (à part)
Je sais lire dans son cœur...

ARNOLD (à part)
Ô ma patrie ! mon cœur te sacrifie
Et mon amour et mon bonheur ! etc.

TELL (à part)
Il rougit de son erreur...
En servant la tyrannie
S'il fut traître à sa patrie
Son remords du moins expie
Un moment de déshonneur.
J'ai su lire dans son cœur...
Il rougit de son erreur,
En servant la tyrannie, etc.
(à Arnold)

Pour nous plus de crainte servile ;
Soyons hommes, et nous vaincrons !

ARNOLD
Et comment venger nos affronts ?

TELL
Tout pouvoir injuste est fragile.

ARNOLD
Contre des maîtres étrangers
Quels sont nos appuis ?

TELL
Les dangers ;
Il n'en est qu'un pour nous,
Pour eux il en est mille.

ARNOLD
Songe aux biens que tu perds !

TELL
Qu'importe !

ARNOLD
Quelle gloire espérer des revers ?

TELL
Je ne sais trop ce que c'est que la gloire,
Mais je connais le poids des fers,
Mais je connais le poids des fers.

ARNOLD
Ton espérance -

TELL
Est la victoire :
La tienne aussi, j'ai besoin de la croire.

ARNOLD
Nous serions libres ?

TELL
C'est mon vœu.

ARNOLD
Mais où combattre ?

TELL
Dans ce lieu.

ARNOLD
Vaincus, quel sera notre asile ?

TELL
La tombe.
ARNOLD
Et notre vengeur, et notre vengeur ?

TELL
Dieu !

ARNOLD (à part)
O Mathilde, idole de mon âme !
Il faut donc vaincre ma flamme !
O ma patrie ! mon cœur te sacrifie
Et mon amour et mon bonheur ! etc.

TELL (à part)
Je sais lire dans son cœur.
Il rougit de son erreur ;
En servant la tyrannie,
S'il fut traître à sa patrie,
Son remords du moins expie
Un moment de déshonneur ! etc.

ARNOLD
Du danger quand sonnera l'heure,
Ami, je serai prêt.
(Arnold va pour partir.)

TELL
Demeure !

ARNOLD (à part)
Ô contretemps fatal !

TELL
Melchthal ! Melchthal !
(on entend encore la chasse)
Qu'entends-je ? c'est Gessler !
Quoi ! tandis qu'il nous brave,
Voudrais-tu, volontaire esclave,
D'un regard dédaigneux implorer la faveur ?

ARNOLD
Quel sévère langage !
Pour moi c'est un outrage.
Je vais sur son passage
Braver l'insolent oppresseur.

TELL
Point d'entreprise téméraire,
Songe à ton père ; il faut le protéger ;
À ta patrie, à ta patrie : il faut la venger, il
faut la venger, il faut la venger.
ARNOLD (à part)
Mon père !

TELL (à part)
Il hésite...

ARNOLD (à part)
Mon pays !

TELL (à part)
Il pâlit !

ARNOLD (à part)
Ma tendresse !

TELL (à part)
Quel est donc...

ARNOLD (à part)
Que faire ?

TELL (à part)
...ce mystère ?

ARNOLD (à part)
Ô ciel, tu sais si Mathilde m'est chère !
Ô ciel, tu sais si Mathilde m'est chère !
Mais à la vertu je me rends,
Mais à la vertu je me rends.
Haine, malheur, malheur à nos tyrans !
(rumeur joyeuse de la fête qui approche)

TELL
Entends au loin, entends au loin
Ces chants de l'hyménée !
N'attristons pas la fête des pasteurs :
À leurs plaisirs ne mêlons pas de pleurs,
Et que, du moins une journée,
Un peuple échappe à ses malheurs.
Et que du moins, etc.

ARNOLD
À ses regards cachons mes pleurs,
Je n'en dois plus qu'à nos malheurs.
Ô Ciel, tu sais si Mathilde m'est chère, etc.

TELL
Il combattra dans nos rangs,
Il combattra dans nos rangs, dans nos rangs.
Haine, malheur, malheur à nos tyrans !
ARNOLD
Mais à la vertu je me rends, etc.
Haine et malheur à nos tyrans ! etc.
(Le cortège des nouveaux mariés arrive. Trois
villageois pénètrent dans les chalets pour y
chercher les jeunes épousées. Hedwige,
Jemmy et Melchthal sortent de la maison de Tell.)

HEDWIGE
Sur nos têtes le soleil brille
Et semble s'arrêter au milieu de son cours,
Pour voir la fête de famille.
Vénérable Melchthal, honneur des anciens jours,
C'est à vous de bénir leurs pudiques amours.
(Les trois couples s'avancent et s'agenouillent
devant le vieux Melchthal, assis sous un arc
de feuillage dressé par les paysans.)


MELCHTHAL (aux jeunes mariés)
Quand le Ciel entend votre promesse
Est-ce à moi de la consacrer ?

TELL
Oui, rendre hommage à la vieillesse,
Mon Dieu, c'est encore t'honorer.

TOUS (sauf Arnold)
Ciel, qui du monde es la parure,
Pour eux fais luire un doux augure !
Car leur tendresse est aussi pure
Que ta lumière en un beau jour ! etc.

ARNOLD (à part)
Ils vont s'unir. Quelle souffrance !
Ils vont s'unir. Pour moi plus d'espérance !
Quels maux j'endure ! fatal amour !
Car leur tendresse est aussi pure
Que ta lumière en un beau jour ! etc.

MELCHTHAL (aux jeunes mariés)
Des antiques vertus vous nous rendrez l'exemple.
Songez, jeunes pasteurs,
Que la Suisse qui vous contemple
Demande à votre hymen des appuis, des vengeurs :

Et vous de vos enfants, ô fidèles compagnes !
Apprenez à vos fils quels furent leurs aïeux
Qu'ils soient grands à leur tour,
Qu'ils soient libres comme eux -
Qu'ils soient l'orgueil de nos montagnes.
(On entend de nouveau les bruits de la chasse.)

TELL
Encore Gessler ! Encore Gessler !

ARNOLD (à part, quittant sans être vu)
Courons !

TELL
Gessler proscrit ces vœux, écoutez le tyran,
Écoutez, il vous crie qu'il n'est plus de patrie,
Que pour jamais elle est tarie,
La source du sang généreux
Qui bouillonnait au cœur de nos aïeux.
Un peuple sans vertus n'enfante plus de braves !
Que légueriez vous à vos fils ?
Les fers dont vos bras sont meurtris.
Femmes, de votre couche exilez vos maris,
Il est toujours assez d'esclaves.

HEDWIGE
Quels transports semblent t'agiter !
Pour les laisser librement éclater le jour est-il venu ?

TELL
Peut-être !
Je ne vois plus Arnold.

JEMMY
Il nous quitte.

TELL
Il me fuit.
Il me dérobe en vain le trouble qui le suit.
(à Hedwige)
Je cours l'interroger, toi, ranime les jeux.

HEDWIGE
Tu me glaces de crainte et tu parles de fête !

TELL
Qu'elle cache aux tyrans le bruit de la
tempête !
Étouffe-la sous vos accents joyeux :
Elle ne doit gronder pour eux
Qu'en tombant sur leur tête !
(Il s'éloigne.)

CHŒUR (dansant)
Hyménée
Ta journée
Fortunée
Luit pour nous.
Ton beau jour
Luit pour nous, etc.
Des couronnes
Que tu donnes,
Ces époux
Sont jaloux.
D'allégresse,
De tendresse,
Leur jeunesse
S'embellit, etc.
Sur nos têtes
Les tempêtes
Sont muettes, etc.
Tout nous dit -
Hyménée,
Ta journée, etc.
Par tes flammes
Dans nos âmes
Tu proclames
Notre espoir ;
Ton ivresse
Joint sans cesse
La tendresse
Au devoir, etc.
Hyménée,
Ta journée, etc.
...ces époux
Sont jaloux.
(Les trois mariés et leurs compagnes forment
un pas de six. À ces danses succède le jeu de
l'arc; plusieurs tireurs s'essaient sans réussir;
Jemmy, plus heureux atteint le but dès le
premier coup.)


Gloire, honneur au fils de Tell,
Il obtient le prix de l'adresse ! etc.

JEMMY (courant à sa mère)
Ah ! Ma mère ! ma mère !

HEDWIGE
Ô moment plein d'ivresse !

CHŒUR
Il obtient le prix de l'adresse :
C'est l'héritage paternel.
Gloire ! Gloire !
Enfants de la nature,
Le simple habit de bure
Nous tient lieu de l'armure
Qui défend les guerriers.
Mais, au but qui l'appelle
Notre flèche est fidèle,
Et l'espoir avec elle
Renaît dans nos foyers, etc. etc.

JEMMY
Pâle et tremblant, se soutenant à peine,
Ma mère, un pâtre accourt vers nous.

PÊCHEUR
C'est le brave Leuthold ; quel malheur nous
l'amène ?
(Leuthold apparaît, pantelant, s'appuyant sur
une hache ensanglantée.)


LEUTHOLD
Sauvez-moi ! Sauvez-moi !

HEDWIGE
Que crains-tu ?

LEUTHOLD
Leur courroux.

HEDWIGE
Leuthold, quel pouvoir te menace ?

LEUTHOLD
Le seul qui n'a jamais fait grâce,
Le plus cruel, le plus affreux de tous...
Ô mes amis ! sauvez-moi de ses coups !

MELCHTHAL
Qu'as-tu fait ?

LEUTHOLD
Mon devoir. De toute ma famille
Le ciel ne me laissa qu'un enfant, qu'une
fille ;
Du Gouverneur un impie soutien,
Un soldat l'enlevait - elle mon dernier bien !
Hedwige, je suis père et j'ai su la défendre.
Ma hache sur son front ne s'est pas fait
attendre ;
Voyez-vous ce sang ? c'est le sien.

MELCHTHAL
Il eut le courage d'un père,
Mais pour lui du tyran redoutons la colère.

LEUTHOLD
Un refuge assuré m'attend sur l'autre bord, -
(se tournant vers le pêcheur)
- conduis-moi.

PÊCHEUR
Ce torrent, cette roche
Du rivage opposé ne permet point
l'approche.
Affronter cet écueil c'est courir à la mort.

LEUTHOLD
Ah ! puisses-tu, barbare, à ton heure dernière,
Trouver Dieu sourd à ton remord,
Comme tu l'es à ma prière !

TELL (revenant, à part)
Arnold a disparu, mes pas n'ont pu
l'atteindre.

CHŒUR DES SOLDATS (de loin)
Leuthold, malheur à toi !

LEUTHOLD
Grand Dieu !

CHŒUR DES SOLDATS
Malheur !

LEUTHOLD
J'implore ta faveur !

TELL
J'entends menacer et se plaindre.

LEUTHOLD
Guillaume, le destin m'accable,
On me poursuit, je ne suis point coupable ;
Je meurs pourtant si je ne fuis soudain :
Pour mon salut il n'est qu'un seul chemin.

TELL
Ta barque est là, pêcheur, tu l'entends.

LEUTHOLD
C'est en vain ;
Comme le Gouverneur il est impitoyable.

TELL
Du ciel il méconnait la loi,
Il te refuse ! eh bien ! suis-moi !

CHŒUR DES SOLDATS (tout près)
C'est du sang que le meurtre exige.
Malheur à toi, Leuthold !

TELL (à Leuthold)
Hâtons-nous, les voilà.
Adieu.

HEDWIGE
Tu vas périr.

TELL
Ah ! ne crains rien, Hedwige.
Les périls sont bien grands ;
(montrant le ciel)
mais Dieu le conduira !
(Hedwige veut retenir son mari ; Jemmy
cherche de son côté à suivre son père ; Tell
les confie tous deux au vieux Melchthal, et,
guidant les pas mal assurés de Leuthold, il
parvient à le faire entrer dans la barque à
l'instant où les soldats vont les saisir tous
deux ; la barque s'éloigne aussitôt.)


CHŒUR DES VILLAGEOIS
Dieu de bonté, Dieu tout-puissant,
Des oppresseurs confonds la rage !
Daigne dérober au naufrage
Le défenseur de l'innocent,
Daigne protéger le courage
Du défenseur de l'innocent !

RODOLPHE
De la justice voici l'heure !

CHŒUR DES SOLDATS
De la justice voici l'heure !

RODOLPHE
Malheur au meurtrier -

CHŒUR DES SOLDATS
Malheur au meurtrier -

RODOLPHE
Qu'il meure !

CHŒUR DES SOLDATS
Qu'il meure !

RODOLPHE
Qu'il meure !

CHŒUR DES SOLDATS
Qu'il meure !

CHŒUR DES VILLAGEOIS
Dieu de bonté, Dieu tout-puissant, etc.
(Ici on voit la barque s'approcher de la rive opposée.)

JEMMY, HEDWIGE
Il est sauvé !

RODOLPHE
Que vois-je ? ô rage !

CHŒUR DES SOLDATS
Il a franchi le funeste passage.

HEDWIGE
De Dieu je reconnais l'ouvrage.

JEMMY, MELCHTHAL
De Dieu je reconnais l'ouvrage.

RODOLPHE
Leur joie est un nouvel outrage ;
Esclaves, malheur à vous tous !

JEMMY, MELCHTHAL (à part)
Quelle insolence !
Pourquoi l'âge
Ne sert-il pas mieux mon courroux ?

CHŒUR DES VILLAGEOIS
Sur nos têtes gronde l'orage,
Éloignons-nous, éloignons-nous !

RODOLPHE
Restez ! il est plus d'un coupable ;
Au meurtrier qui prêta son secours ?
Nommez le traître, il y va de vos jours.

JEMMY
Ils vont parler...

HEDWIGE
Ils vont parler...

JEMMY
...la terreur les accable.

HEDWIGE
...la terreur les accable.

RODOLPHE
(faisant cerner la foule par ses soldats)
Obéissez,
Il y va de vos jours.

CHŒUR DES SOLDATS
Il y va de vos jours.

JEMMY, HEDWIGE, CHŒUR DES VILLAGEOISES
(tombent à genoux)
Vierge que les chrétiens adorent.
Entends nos voix, elles t'implorent ;
Dérobe au glaive des méchants
Et nos/leurs maris et nos/leurs enfants !
Vierge que les chrétiens, etc.

PÊCHEUR
Il y va de vos jours.
Ah ! craignons nos tyrans ! etc.

MELCHTHAL
Il y va de nos jours !
Je les vois tous tremblants ! etc.

CHŒUR DES VILLAGEOIS
Il y va de nos jours !
Ah ! craignons nos tyrans ! etc.

CHŒUR DES SOLDATS
Les vois-tu tous tremblants ?
Il y va de vos jours !
Les vois-tu tous tremblants ? etc.

RODOLPHE
Je les vois tous tremblants.
Obéissez, obéissez,
Il y va de vos jours ! etc.

MELCHTHAL
Comme lui nous aurions dû faire.
Amis, calmez votre frayeur,
Il ose agir, osez vous taire !

CHŒUR DES VILLAGEOIS
Il ose agir, osons nous taire !

RODOLPHE
Tremblez, tremblez ! nommez le traître !

MELCHTHAL
Dis au tyran que cette terre
Ne porte point de délateur.

RODOLPHE
Qu'on saisisse ce téméraire !
Qu'on saisisse ce téméraire
Qui brave ma juste fureur.
Que du ravage,
Que du pillage
Sur ce rivage
Pèse l'horreur !
Honte et misère
Sont le salaire
Que ma colère
Lègue au malheur !

JEMMY
Si du ravage,
Si du pillage,
Sur ce rivage
Pèse l'horreur,
Vil mercenaire,
L'arc de mon père
Peut nous soustraire
À ta fureur !

JEMMY, HEDWIGE, PÊCHEUR, MELCHTHAL, CHŒUR DES VILLAGEOIS
Si du ravage,
Si du pillage,
Sur ce rivage
Pèse l'horreur,
Vil mercenaire,
L'arc de mon/son père
Peut nous soustraire
À ta fureur.
Nous bravons ta fureur ! etc.

RODOLPHE
Que du ravage,
Que du pillage,
Sur ce rivage
Pèse l'horreur !
Ah ! craignez ma fureur ! oui ! etc.

CHŒUR DES SOLDATS
Que du ravage,
Que du pillage,
Sur ce rivage
Pèse l'horreur !
Honte et misère
Sont le salaire
Que ma colère
Lègue au malheur !

RODOLPHE
Que du ravage, etc.

JEMMY
Si du ravage, etc.

JEMMY, HEDWIGE, PÊCHEUR, MELCHTHAL, CHŒUR DES VILLAGEOIS
Si du ravage,
Si du pillage, etc.
...nous bravons ta fureur !

RODOLPHE, CHŒUR DES SOLDATS
Que du ravage,
Que du pillage, etc.
...ah ! craignez ma/sa fureur !
(Les soldats s'emparent de Melchthal ; les Suisses
cherchent à le délivrer, mais ils sont sans armes,
et l'on entraîne violemment sous leurs yeux le vieillard
qu'ils voudraient suivre, quand une haie de hallebardes
les arrête. Le rideau tombe sur ce tableau.)


libretto by Étienne de Jouy, Hippolyte Bis 
Contents: Personnages; Premier Acte; Deuxième Acte; Troisième Acte; Quatrième Acte

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